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Des collections à la création. L’histoire d’une résidence et d’une exposition
Vivantes, les collections du Musée des beaux-arts d’Arras entretiennent un lien dynamique avec les créateurs d’aujourd’hui, dans une continuité entre l’ancien et le contemporain. Le bâtiment, une ancienne abbaye bénédictine du 18e siècle, et les collections, environ 32 000 objets du Moyen Âge à la fin du 19e siècle, forment une source d’inspiration inépuisable ainsi qu’une matière à interroger, à retravailler, et sur laquelle poser un regard singulier et actuel. Si toute résidence au musée est conçue comme une carte blanche donnée à l’artiste et commence par une phase de découverte tous azimuts, Michael Wittassek s’est rapidement concentré sur la notion de verre, support de transparence et de reflets. Sa recherche artistique, pratique et théorique, s’attache au verre tour à tour comme outil de production (technique du cliché-verre), motif représenté (peinture de trompe-l’œil) et matériau constitutif de l’installation inédite intitulée Éclat (plaque, bris de verre).
Le cliché-verre est une technique combinant dessin, gravure et photographie, mise au point vers 1850 par deux photographes arrageois, Adalbert Cuvelier (1812-1871) et Léandre Grandguillaume (1807-1885). Cette technique complexe, sans emploi d’objectif, est pratiquée dans la seconde moitié du 19e siècle, par les artistes paysagistes intéressés par le rendu des variations de la lumière et de l’atmosphère, de l’école d’Arras comme Constant Dutilleux (1807-1865) ou Camille Corot (1796-1875), et de l’école de Barbizon notamment. À cette époque, la photographie en est encore à ses débuts, et l’apparition du cliché-verre advient dans un contexte d’expérimentations techniques. Une plaque de verre est enduite d’une solution chimique (collodion) ou d’encre d’imprimerie. L’artiste grave le motif en ôtant de la matière à cette préparation à l’aide d’une pointe ou d’une brosse. Le dessin gravé sur le verre, le « négatif » de l’œuvre, s’imprime sur un papier sensibilisé préparé pour noircir au contact de la lumière. Mis au point par des photographes, le cliché-verre intéresse avant tout à cette époque des peintres qui y voit un médium artistique aux caractéristiques propres davantage qu’une photographie capable de dupliquer et de diffuser largement leurs œuvres picturales. Les plaques de verre originales, supports particulièrement fragiles, ont quant à elles bien souvent été brisées ou perdues. Seuls les tirages témoignent aujourd’hui de ce travail à la fois subtil et puissant sur le trait, donnant lieu à des compositions foisonnantes comme Paysage marécageux de Constant Dutilleux (1853, inv. d884) ou au contraire quasi abstraites comme en témoigne Les Arbres dans la montagne de Camille Corot (1856, inv. 000.2.10). Le cliché-verre, explorée au 20e siècle par Man Ray (1890-1976) notamment, est encore utilisée aujourd’hui par les artistes qui effectuent des tirages sur papier argentique ou cyanotypique. Attiré par l’expérimentation et les innovations techniques des premières décennies de l’histoire de la photographie, Michael Wittassek s’est tout de suite intéressé à cet ensemble atypique des collections du musée d’Arras. Il s’est interrogé sur le statut artistique du verre gravé, objet unique sur lequel l’artiste est intervenu qui n’est pas conservé ainsi que sur la distance entre le motif vu dans la nature par ses peintres de plein air et sa retranscription toute subjective sur le papier pourtant photographique, comme l’ouverture d’un entre-deux photographique dès les années 1850.
La peinture illusionniste des 17e et 18e siècles, originaires des contrées du Nord de l’Europe, a également retenu son attention, notamment Bouquet dans une niche, huile sur toile peinte en 1785 par l’artiste régionale Dominique Doncre (1743-1820) (inv. 984.2). Ce trompe-l’œil figure un bouquet composé de lilas, de dahlias, de narcisses et de tulipes dans un vase à monture Louis XVI en bronze doré, installé dans une niche en bois, architecture décorative d’illusion que l’on croirait creusée dans le mur. Au pied du vase se promène un hanneton, insecte coléoptère. Le perfectionnement et la rigueur de la technique à l’huile comme la superposition des glacis permettent au peintre de rendre les matières de manière très réaliste : la niche imitant le bois, les effets de lumières et de clair-obscur créant la perspective ou encore la transparence de l’eau du vase. Il faut imaginer l’effet que devait donner cette peinture décorative sans doute créée pour l’intérieur d’un particulier, formant un piège optique, entre réalité et illusion.
Réalisés à la manière d’une photographie, quelques cinquante ans avant l’invention moderne de cette technique, l’eau du vase en verre transparent et ses reflets retiennent l’attention de Michael Wittassek. Le peintre nous montre le hors-champ du tableau dans lequel il se situe, éclairé par deux ouvertures lumineuses. Il pourrait s’agit d’un espace vécu, son propre atelier, à la manière d’un jeu illusionniste bien connu en Europe du nord, depuis
Les Époux Arnolfini de Jan van Eyck (1434, National Gallery de Londres), prisé encore au 17e siècle dans les peintures de nature morte et de vanités des artistes hollandais Pieter Gerritsz van Roestraten ou Pieter Claesz notamment. Métaphoriquement, le trompe-l’œil déploie une réflexion sur le temps et la fugacité de la vie terrestre, à l’image des fleurs coupées. La photographie entraîne un renversement de cette tradition de la nature morte, saisi d’un monde instable, car il s’agit d’enregistrer « pour toujours » une scène, une personne, le temps. Cet espace hors-champ pourrait enfin représenter un espace fantasmé en partie ou totalement fictif, irréel, un décalage volontaire pris avec le prétendu réalisme de l’image. Il signalerait une réflexion distanciée sur soi, un reflet de l’artiste s’interrogeant sur la peinture, l’art et leur capacité à créer des mondes.
Dans l’installation inédite intitulée Éclat, Michael Wittassek met en espace une quarantaine de tirages photographiques grand format, parfois associés les uns aux autres, de manière fragmentée, éclatée. Cette création in situ en volume est aménagée dans le péristyle du cloître de l’ancienne abbaye Saint-Vaast rappelant l’architecture religieuse du 18e siècle, marquée par ses amples proportions et sa rigoureuse organisation, rythmée par les colonnes et le damier noir et blanc du sol.
Suivant son processus de création, Michael Wittassek a d’abord procédé à de multiples prises de vue argentiques de plaques de verre de petit format, parfois intactes, parfois brisées, teintées plus ou moins régulièrement au noir de suie, marquées par la trace de la main ou du doigt. À la manière d’un cliché-verre, les motifs obtenus forment de manière aléatoire une nature imaginaire, constituée de réseaux de traits évoquant de mousseux branchages parfois troués par un illusoire rayon de lumière. Les tirages sont ensuite pliés ou froissés, exposés à un éclairage accentuant les reflets et re-photographiés grâce à un appareil numérique. Un effet de glacis se crée alors voilant ou modifiant le motif originel sur les seconds tirages de grand format. Cet usage du verre teinté est repris en volume dans l’installation : aux tirages assemblés, suspendus, sont associés des plaques et des bris de verre. Dans Éclat, le verre comme objet réel se mêle au verre comme motif, lui-même en miroir, image retravaillée de l’image de l’objet.
Michael Wittassek cherche à donner « une expression en volume du cliché-verre » en travaillant ainsi la matérialité du verre et du tirage papier mais également la lumière, son évolution à travers les grandes baies de l’ancien cloître, ses effets et reflets sur les éléments transparents ou opaques, brillants ou mats de l’installation. L’artiste conduit une réflexion autant sur la matérialité éclatée, fragmentée, geste de dispersion voire de destruction que sur la création d’un monde et d’un récit qui lui est propre. La photographie devient alors révélation et destruction par la lumière, un éblouissement par le noir et ses nuances infinies. Une série de cinq tirages disposés dans la galerie du cloître attenante et travaillés au bitume de judée, composant organique d’origine fossile, rappelle enfin tout à la fois les peintres du 19e siècle comme Eugène Delacroix (1798-1863), et les techniques employés par les premiers artistiques photographes comme Nicéphore Niepce (1765-1833), marquant ainsi la continuité entre créations anciennes et contemporaines.

Mélanie Lerat, Conservatrice du patrimoine, Musée des beaux-arts d’Arras
texte du journal
L’être lieu N°12, Mars 2020, p. 23
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Von den Sammlungen zum Werk. Die Geschichte einer Residenz und einer Ausstellung

Die Sammlung des Museums der schönen Künste in Arras lebendig haltend, fördert es einen dynamischen Austausch mit zeitgenössischen Künstlern und schafft Kontinuität zwischen Altem und Neuem. Das Gebäude, eine ehemalige Benediktinerabtei aus dem 18. Jahrhundert, und die Sammlungen, rund 32.000 Objekte vom Mittelalter bis zum Ende des 19. Jahrhunderts, bilden eine unerschöpfliche Quelle der Inspiration sowie Forschungsmaterial, welche es zu hinterfragen und zu überarbeiten gilt. Grundlage, um einen aktuellen und einzigartigen Blick darauf werfen zu können. Jedes Stipendium des Museums ist als eine „carte blanche“ für den Künstler konzipiert und beginnt mit einer in alle Richtungen offenen Phase des Entdeckens. Michael Wittassek konzentrierte sich schnell auf den Begriff des Glases als transparentes und reflektierendes Material. Seine künstlerische Recherche, praktisch wie theoretisch, fokussierte sich auf Glas als Produktionsmittel (Cliché-Verre Technik), als dargestelltes Motiv (Trompe-l'œil-Malerei) und als Ausgangsmaterial für seine neue Installation mit dem Titel éclat (Glasscheibe, Splitter).
Das Cliché-Verre ist eine Technik, welche Zeichnung, Radierung und Fotografie kombiniert. Erfunden wurde sie um 1850 von den beiden aus Arras stammenden Fotografen Adalbert Cuvelier (1812-1871) und Léandre Grandguillaume (1807-1885). Diese komplexe Technik – ohne Verwendung eines Fotoapparates – wurde in der zweiten Hälfte des 19. Jahrhunderts von Landschaftskünstlern praktiziert, die an den unterschiedlichen Stimmungen von Licht- und Atmosphäre interessiert waren, der Schule von Arras (l’école d’Arras ) angehörten, wie Constant Dutilleux (1807-1865) oder Camille Corot (1796-1875) und insbesondere der Schule von Barbizon (l’école de Barbizon). In dieser Zeit befand sich die Fotografie noch in ihren Anfängen und das Cliché-Verre gehörte in den Kontext technischer Experimente. Eine Glasplatte wird mit einer chemischen Lösung (Kollodium) oder mit Druckerschwärze beschichtet. Der Künstler ritzt mit einer Nadel oder einer Bürste das Motiv in das Material der zuvor präparierten Glasplatte ein. Die auf das Glas gravierte Zeichnung, das "Negativ", wird auf lichtempfindlichem Papier ausbelichtet und erscheint durch Licht schwarz. Obwohl von Fotografen entwickelt, war das Cliché-Verre besonders für die damaligen Maler von besonderem Interesse, die es als ein künstlerisches Medium mit eigener Charakteristika betrachteten und besser als eine Fotografie in der Lage war, ihre Bildwerke zu vervielfältigen und weiter zu verbreiten. Die originalen Glasplatten, die extrem empfindlich sind, zerbrachen oft oder gingen verloren. Einzig die Abzüge zeugen noch heute von dem subtilen wie aussagekräftigen Duktus der Arbeiten, wie die lebendige Komposition der Paysage marécageux von Constant Dutilleux (1853, inv. d884) oder, im Gegenteil fast abstrakt, Les Arbres dans la montagne von Camille Corot (1856, inv. 000.2.10). Das Cliché-Verre wurde im 20. Jahrhundert besonders von Man Ray (1890-1976) erforscht, wird aber auch noch heute von Künstlern benutzt, die mit Silbersalz-Papieren oder Cyanotypien arbeiten. Angezogen von den Experimenten und technischen Neuerungen der ersten Jahrzehnte der Geschichte der Fotografie, interessierte sich Michael Wittassek sofort für diese atypische Sammlung des Musée d’Arras. Er hinterfragte den künstlerischen Status des Cliché-Verre, ein Unikat, in das der Künstler zeichnete und das nicht erhalten geblieben ist, sowie die Distanz zwischen dem von den Freiluftmalern in der Natur gesehenen Motiv und seiner völlig subjektiven – obwohl fotografischen – Umsetzung auf Papier, als ein fotografisches Zwischenspiel der 1850er Jahre.
Auch die illusionistische Malerei des 17. und 18. Jahrhunderts, aus den nördlichen Regionen Europas stammend, erregte seine Aufmerksamkeit, insbesondere Bouquet dans une niche, Öl auf Leinwand, 1785 von dem regionalen Künstler Dominique Doncre (1743-1820) gemalt (Inv. 984.2). Dieses Trompe-l'œil zeigt einen Strauß aus Flieder, Dahlien, Narzissen und Tulpen in einer Louis XVI. Vase mit vergoldeten Bronzegestell, die in einer Holznische steht. Eine dekorative Architektur einer Illusion, als wäre sie in die Wand gesetzt. Am Fuß der Vase befindet sich ein Maikäfer. Die Perfektion und Strenge der Ausführung in Öl sowie die Schichtung der Lasuren erlaubten es dem Maler, die Materialien sehr realistisch erscheinen zu lassen: Das imitierte Holz der Nische, perspektivische Licht und hell-dunkel Effekte oder die Transparenz des Wassers in der Vase. Man muss sich die Wirkung vorstellen, die dieses dekorative Gemälde, wahrscheinlich für die Wohnung einer Privatperson geschaffen, gehabt haben musste, eine optische Falle zwischen Realität und Illusion.
Etwa fünfzig Jahre vor Erfindung der Fotografie in foto-realistischer Weise gemalt, zieht das Wasser in einer transparenten Vase und deren Reflexionen den Blick auf sich. Der Maler zeigt uns das Umfeld des Gemäldes, in dem er sich befindet und welches durch zwei große Fenster belichtet wird. Es könnte sich um einen Wohnraum handeln, vielleicht sein eigenes Atelier, in der Art eines illusionistischen Spiels, das in Nordeuropa durch Jan van Eycks Ehepaar Arnolfini (1434, National Gallery of London) bekannt und noch im 17. Jahrhundert in den Stillleben und Vanitas Gemälden niederländischer Künstler wie Pieter Gerritsz van Roestraten oder Pieter Claesz geschätzt wurde. Das Trompe-l'oeil mit seinen Blumen als Metapher entwickelt eine Reflexion über die Zeit und die Flüchtigkeit des irdischen Lebens. Die Fotografie bewirkt später eine Umdeutung dieser Tradition des Nature-morte, welche für eine instabile Welt steht, weil es nun darum geht, eine Szene, eine Person, die Zeit usw. „für immer“ festzuhalten. Der außerhalb der Leinwand liegende Raum des Malers könnte schließlich einen phantasierten Raum darstellen, teilweise oder ganz fiktiv, unwirklich, eine willentliche Abweichung des vorgegebenen Realismus des Bildes. Es könnte ein distanziertes Nachdenken über sich selbst signalisieren, ein Nachdenken des Künstlers, der sich, seine Malerei, die Kunst und ihre Fähigkeit, Welten zu schaffen, in Frage stellt.
In seiner neuen Arbeit éclat beherrschen dreißig großformatige Fotografien, teilweise in Gruppen zusammengefasst, fragmentiert und wie Splitter wirkend, den Raum. Diese umfassende ortsbezogene Arbeit befindet sich im Säulengang der ehemaligen Abtei Saint-Vaast. Man wird an die religiöse Architektur des 18. Jahrhunderts erinnert, die sich durch ihre großzügigen Proportionen und ihre strenge Organisation auszeichnet, rhythmisiert durch die Säulen und das Schwarzweiß des Fußbodens.
Seinem Arbeitsprozess vorausgegangen sind eine Vielzahl von Abzügen kleinformatiger Glasplatten, teilweise intakt, teilweise zersplittert, mehr oder weniger stark durch Ruß geschwärzt und von Hand- und Fingerabdrücken gezeichnet. Es ist eine Art Cliché-Verre, wo sich aus zufällig erhaltenen Motiven einer imaginäre Natur ein Netzwerk von Spuren bildet, das teilweise an moosartiges Astwerk erinnert, manchmal von einem illusionistischen Lichtstrahl durchbohrt wird. Diese Abzüge werden gefaltet oder geknüllt und so ausgeleuchtet, das sich die Reflexionen verstärken, dann mit einer Digitalkamera neu fotografiert. Ein Lasur-Effekt stellt sich ein, der das ursprüngliche Motiv im zweiten Abzug des Großformates verschleiert oder verändert. Der Einsatz von Glasscheiben wiederholt sich im Raum der Installation: neben den zusammengestellten, aufgehängten Abzügen fügen sich Glasscheiben und Glassplitter hinzu. In der Arbeit éclat verschmilzt Glas als realer Gegenstand mit dem Glas als Motiv, spiegelt sich selbst, als überarbeitetes Bild des Bildobjektes.
Michael Wittassek versucht dem Cliché-Verre eine Dreidimensionalität zu verleihen indem er Glas und Fotopapier einsetzt, doch genauso das Licht benutzt, welches durch die großen Fenster des alten Klosters fällt. Es lässt Effekte und Reflexe auf transparenten und opaken, matten und glänzenden Elementen der Installation entstehen. Der Künstler verfolgt in seiner Arbeit neben dem Einsatz von Fragmenten und Splitten – eine Geste der Zerstreuung und sogar Zerstörung – ebenso die Erschaffung einer eigenen Welt und einer neuen Erzählung. Die Fotografie offenbart sich durch Licht und wird durch Licht zerstört, eine Blendung durch Schwarz in seinen unendlichen Nuancen.
Eine Serie von fünf Fotografien, die in der angrenzenden Klostergalerie angeordnet sind und zu deren Herstellung Judäa-Bitumen, einem organischen Bestandteil fossilen Ursprungs, verwendet wurde, erinnert sowohl an Maler des 19. Jahrhunderts wie Eugène Delacroix (1798-1863) als auch an die Techniken der ersten künstlerischen Fotografen wie Nicéphore Nièpce (1765-1833) und schließt so den Kreis von Vergangenheit und Gegenwart.



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